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Le BUDO XI est Guy ROLAND

Judoka comme nombre des précurseurs de la pratique du kendo en France, démiurge d'un des plus grands dojo européens. Il aura réussi à compter sous sa présidence plus de 300 licenciés dont il connaissait chacun des prénoms.

KEN DO Magazine – En 2023, le Budo XI aura 50 ans mais vous n’avez pas commencé le Kendo dans ce dojo.

J’ai commencé rue Servan comme élève et lorsque le propriétaire a décidé de prendre sa retraite, il m’a proposé de reprendre le dojo et j’ai accepté. L’enseignement était confidentiel à l’époque les enseignants ne voulaient pas trop communiquer, un procédé un peu sectaire ce qui n’a pas permis
à la discipline de se développer aussi rapidement qu’elle aurait dû. Et c’est grâce à la rencontre avec monsieur HAMOT à l’INSEP – mais Michel GUENTLEUR vous a déjà raconté cette histoire – qui m’a envoyé quelques jours plus tard monsieur YOSHIMURA que l’histoire a commencé avec les quatre premiers élèves.

Une autre petite histoire dans l’histoire, c’est l’incendie du dojo de la rue Servan pendant un cours en la présence d’un expert japonais.

C’est arrivé un mercredi en plein cours, j’ai senti la fumée et au premier étage des flammes passaient par la fenêtre de l’immeuble à côté. Nous avons appris plus tard que l’artisan de l’immeuble voisin avait brûlé sa comptabilité pour la faire disparaître…Pas le temps de prendre de douche, tout le monde est sorti. C’était la Sayonara party du sensei qui était présent ce soir-là, nous ne pouvions rien faire pour l’incendie et le restaurant était réservé alors nous sommes partis dîner. A notre retour, tout était brûlé et seules les quelques armures et le petit matériel que j’avais lancés dans la cave avant de quitter l’immeuble en feu avaient survécu au désastre. Mais huit cents pratiquants n’avaient plus de lieu de pratique. En plus du Kendo à l’époque il y avait du Judo, de l’Aïkido, de la boxe française… J’ai dû indemniser les enseignants des différentes disciplines et les laisser suivre leur chemin. Et c’est avec beaucoup de difficultés que j’ai trouvé une toute petite salle à l’étage d’un club de musculation. De cinquante pratiquants, nous étions redescendu à quatre. Pendant ce temps, avec l’appui du maire du onzième arrondissement, j’espérais obliger la propriétaire à reconstruire mais elle n’a jamais voulu car l’obligation de refaire une salle de sport ne l’intéressait pas financièrement ; elle voulait bâtir des studios, du coup c’est devenu un jardin et rien n’a jamais été reconstruit à cet endroit. Mais mon contact avec le maire m’a permis de connaître l’ouverture du gymnase de la Cour deslions, le lieu et la date de la distribution des créneaux et j’ai réussi à en récupérer pour de nombreuses disciplines. Puis, quelques temps plus tard, j’ai décidé de ne conserver que le Kendo, l’Aïkido et le Jodo.

Depuis sa création le Budo XI a toujours brillé dans les compétitions nationales. C’était un challenge pour vous ? 

Les élèves me disaient : « on va te ramener du métal », et souvent c’était le cas. Lorsque que l’on gagne, c’est une satisfaction mais la manière compte plus que le résultat ! Je préfère que l’on privilégie la fraternité et la cohésion d’une équipe même si elle perd, et c’est une chose que nous avons inculqué dans ce club et qui est l’élément primordial de cette réussite. Peut-être que les règles strictes du savoir-vivre ensemble, le rejet de tout sujet polémique l’expliquent en partie. Prendre du plaisir dans la pratique et boire un coup et puis c’est tout ; la porte de sortie était grande ouverte pour ceux qui auraient évoqué des sujets politiques ou religieux. Tout le monde était prévenu dès le départ. C’est aussi pourquoi les nombreuses nationalités, une quinzaine, présentes dans le dojo s’entendent parfaitement.

La compétition, l'arbitrage ce sont des chemins qu'il faut suivre pour améliorer son Kendo ?

Oui, un passage de grade c’est quelque chose d’assez frustrant, vous dites pourquoi pas moi ? Où ça n’a pas fonctionné ? Je n’ai jamais forcé personne à faire de la compétition, on fait du shiai si l’on a envie d’en faire. Certains me disaient « Guy ce n’est pas pour moi », d’autres bouillonnaient d’impatience et il fallait parfois que je réponde « On verra l’année prochaine, ce sera mieux ». Si la compétition n’est pas indispensable pour la progression dans le Kendo, en revanche celui qui n’a jamais fait de compétition et qui souhaite devenir arbitre est dans l’erreur. Il n’aura pas la notion du ippon, il va lever le bras quand il ne faut pas ou le lever en même temps que ceux qui sont à côté de lui.  

Article extrait du magazine Ken Do Mag N°4
Propos recueillis : Franck DESPAGNAT
photos  : Eric MALASSIS